10 déc. 2009

Clivage entre les élu-e-s et le peuple?

Ces propos sont colportés depuis un certain temps par plusieurs acteurs: par les populistes, par des journalistes, par des citoyen-ne-s déçu-e-s...
Une question me turlupine: quelle mesure utilise-t-on pour cette affirmation? Il semblerait que cela soit l'adéquation entre les mots d'ordre des partis concernant les votations et le résultat ou encore la prise en considération des préoccupations des gens.
Un héros en la matière serait actuellement Oskar Freysinger se pavanant comme récompense dans tous les medias du monde...Pourtant je m'interroge à nouveau: qu'a-t-il fait exactement pour le peuple? A-t-il amélioré la qualité de vie des gens? A-t-il baissé les primes d'assurance-maladie? S'est-il prononcé pour des allocations familiales ou une politique du logement à loyers modérés? Quelles sont ses préoccupations en matière de lutte contre le chômage à part s'opposer à tout plan de relance ou presser comme un citron toutes les prestations pour les chômeurs et chômeuses?
Mystère... Alors j'ose le dire: les élu-e-s de gauche ne sont pas éloignés des préoccupations du peuple, et ce, sous l'angle des 2 critères rédigés plus haut. Par exemple, en juin 2008, le peuple a suivi toute la classe politique sauf l'udc pour contrer l'initiative qui souhaitait instaurer la naturalisation par le peuple. Par exemple, le peuple a voté les bilatérales soutenues par toute la classe politique sauf l'udc. Par exemple le PS se bat depuis des années pour un service public garantie de l'égalité: référendum gagné contre la libéralisation de l'électricité, l'idée de la caisse unique est désormais acquise même dans la tête de la droite, les allocations familiales ont augmenté. Le prochain combat sera bien sûr le référendum contre la révision de la loi sr l'assurance chômage qui est une vaie gifle pour les travailleurs, jeunes et chômeurs de notre pays. Comme si c'étaient eux les responsables du marché économique du pays... Alors là, toute la classe politique sera contre le ps... On verra ce que dira le peuple.

1 déc. 2009

minarets: le vote par les tripes

Un coup de massue. Voilà ce que les opposant-e-s à l’initiative ont reçu en pleine figure dimanche dernier. Un grand cri : Non ! et tout de suite après une question : pourquoi, pourquoi, pourquoi ?
Le peuple suisse a ainsi ancré dans la Constitution une discrimination, visant une minorité. Bien sûr les musulmans de Suisse pourront toujours aller prier dans des mosquées. Il n’en reste pas moins que le peuple a décidé de viser symboliquement une minorité. C’est un vote avec les tripes. L’émotionnel l’a emporté sur la raison.
Mais soyons sincères : la lutte était perdue d’avance. Le débat a tournée sur l’islam. Or, remonter l’image de cette religion suite à la campagne anti-musulmans commencée après le 11 septembre 2001 était mission impossible. Expliquer l’islam en deux mois qu’a duré la campagne alors que cette religion est dénigrée depuis des années et que les lieux de rencontre entre cette religion et la population manquent cruellement relevait de l’impossible.
A quelques jours du résultat du vote les élu-e-s de droite rivalisent d’ingéniosité pour déposer des interventions plus ou moins judicieuses pour essayer de rassurer le peuple. Pourtant, ce qui a été dit durant la campagne n’en reste pas moins vrai le lendemain. Les rapports du département justice et police sont formels, il n’existe pas de foyers d’extrêmistes en Suisse. Les musulmans de Suisse sont modérés, provenant des balkans et le 80% ne pratiquent pas et ne s’intéressent pas à la religion. Il n’y pas de femmes lapidées ou excisées en Suisse, et si tel était le cas pour peu que les autorités en soient informées, elles sanctionneraient évidemment les coupables.
Alors pourquoi cette avalanche de propositions qui soutendent que la communauté musulmane est fondamentaliste ?
Il nous faut bien sûr prendre au sérieux les craintes exprimées par les gens, mais il ne faut pas continuer à les entretenir. Ainsi, je crois que la question qui se pose également aujourd’hui est : comment en est-on arrivé là ? Comment est-ce que le peuple Suisse a voté avec ses tripes et oublié sa raison ? Un début de réponse est possible : depuis dix ans on banalise la xénophobie, le racisme. Par des campagnes d’affichages par exemple flirtant avec la légalité, par des propositions d’un ancien Conseiller Fédéral de supprimer la norme anti raciste de notre Constitution tendant à démontrer que cette thématique n’est pas importante dans notre pays. Par un manque d’ « éducation » des Suisses au débat public et donc une certaine difficulté à débattre des valeurs. D’ailleurs, la réintroduction des cours de civisme dans nos écoles semble indispensable.
Mais la banalisation de la xénophobie ne suffit pas à expliquer ce vote. Il est clair que certaines questions doivent être abordées non seulement d’un point de vue pragmatique, par exemple comment gérer le port du voile, qui a « le droit » de le mettre et où, mais aussi d’un point de vue des valeurs Le fait qu’une très rare minorité de la communauté musulmane estime que les femmes et les hommes ne doivent pas se serrer la main doit être discutée à la lumière du principe de l’égalité à laquelle nous croyons.. Nous touchons là un domaine extrêmement important : le rapport entre religion et laïcité.
Mais il y a manière et manière de débattre. Il nous faut renforcer les lieux de dialogue entre l’Etat et TOUTES les religions. Par des plateformes, des interfaces de discussion par exemple. Il nous appartient aujourd’hui de calmer le jeu, de rappeler que la communauté musulmane n’a pas besoin de plus ou de moins d’intégration que d’autres communautés ou de lois spéciales…
En conclusion, si j’estime que le résultat de dimanche est grave, il s’agit aussi de l’insérer dans un contexte de crise internationale et nationale : crise économique et sociale. Terreau toujours fertile à la recherche d’un bouc émissaire.
Ironie de la politique : le ps se bat depuis toujours pour l’intégration de toutes les personnes. Etrangères, suisses, athées, croyantes. Par une mixité sociale, par une politique de la formation digne de ce nom, …
Quoiqu’il en soit, les initiants devront assumer cette fois leur provocation. Qu’ils le veuillent ou non, que cela les touche ou non, ce vote aura des répercussions dans notre rapport au monde. Dans nos rapports avec les organismes européens et internationaux, dans nos rapports économiques avec les pays musulmans. Et surtout, ce vote est salué par les nationalistes européens ce qui réjouit certainement les initiants, mais certainement moins la grande majorité des votants qui dimanche a dit oui.