27 oct. 2010

Le PS qui gagne n’est pas une pâle copie de la droite !

Le réel enjeu de la votation du 28 novembre sur l’expulsion des criminels étrangers réside dans la décision du PS Suisse sur le contre-projet à l’initiative. Le Congrès, fin octobre à Lausanne, en dira long sur son positionnement à long terme sur l’échiquier socialiste européen. Il y aura d’un côté les soi-disant pragmatiques qui pensent que pour battre l’UDC ou gagner des électeurs, il faut durcir le ton en acceptant le contre-projet qui, même s’il abandonne les côtés inacceptables de l’initiative, durcit néanmoins la loi actuelle, et de l’autre, celles et ceux qui ont analysé les résultats de ces dernières années pour se rendre compte qu’à chaque fois que la droite ou la gauche a voulu copier l’UDC, l’échec a été au rendez-vous.
Cela fait maintenant plus de 15 ans que les socialistes proposent des mesures strictes en matière de sécurité. Dans plusieurs cantons, c’est nous qui avons demandé l’augmentation du nombre de policiers. Dans certaines villes tenues par la gauche, des caméras de surveillance ont fait leur apparition dans des lieux sensibles. Le PS Suisse a pris position sans ambigüité, mais pour quel résultat ? Ce qui est important, ce n’est toutefois pas que le parti progresse, ce qui est grave - lorsque nous perdons - c’est que nous nous privons d’espace public pour proposer notre vision du monde comprenant plus d’équité et de justice sociale et fiscale, ainsi que des services publics forts. La surenchère politique en matière sécuritaire ne nous a jamais été profitable.

L’enjeu du renvoi ne passe pas par un changement de la loi amplement suffisante, mais dans le développement des accords de réadmission. Nous le savons et le disons depuis longtemps. Mais les 2 ministres UDC à la tête du DFJP depuis 8 ans (Blocher et Widmer Schlumpf) se sont bien gardés d’en conclure. Prenons, par exemple, le canton de Vaud. Entre 2008 et 2010, 835 personnes ont fait l’objet d’une mesure de renvoi. Notamment pour non autorisation de séjour. 375 l’ont été réellement car il manquait les accords de réadmission pour le faire.

Quant au contenu du contre-projet il n’est pas anodin. En effet, il précise tellement le degré de gravité de l’infraction (en le durcissant par rapport à l’initiative) qu’une personne étrangère surpris avec de l’alcool au volant se verrait renvoyée ! Alors oui il y a la clause de la proportionnalité. Mais de deux choses l’une : soit cette clause est prise en compte par le juge lorsqu’il déclare ou non l’expulsion et cela ne change strictement rien à la situation actuelle, soit le côté automatique en fonction de la gravité des délits demeure et cela est inacceptable. Dans un cas comme dans l’autre, se battre pour le contre-projet revient à légitimer le discours de l’UDC : nous ne sommes pas assez sévères en Suisse !

Quant aux normes sur l’intégration, c’est de la poudre aux yeux, même pour les cantons paresseux en la matière. En effet, si l’on traduit le texte juridique en termes clairs, cela signifie que la Confédération prendra contact avec eux… pour en discuter. Toute personne qui s’occupe d’intégration sait bien que l’enjeu- s’agissant de la Confédération - reste le financement de mesures. Thème qui n’a pas été pris en compte dans le contre-projet malgré tous nos efforts. De telles mesures auraient valu la peine d’être soutenues.

En fin de compte, ce n’est pas au PS de porter les idées et les valeurs de la droite. Elle a voulu le contre-projet au lieu d’invalider l’initiative, il lui revient donc de défendre son projet de société. La seule façon de battre l’UDC n’est pas de lui donner raison en durcissant la loi actuelle. Il faut refuser d’entrer dans son jeu. A choisir entre se tirer une balle dans le cœur ou dans le pied, le PS doit répondre qu’il refuse tout simplement de tirer !